Maîtres DAVID, BOITEL et JABAKHANJI Avocats chez Prémisse Avocats

Extrait de la Gazette n° 60 - Octobre 2025 - Propos recueillis par Augustin BERGONZI

Me Florence DAVID

Bonjour Maître DAVID. Dans le cadre de la Gazette de l’IDPA, nous souhaitons aborder la question de la création d’un cabinet en droit public des affaires au travers de votre actualité. Pouvez-vous vous présenter et nous en dire quelques mots ?

Nous avons créé notre structure à la fin du mois de mai. C’est une entité récente, mais qui s’inscrit dans la continuité d’une équipe. Le cabinet rassemble en effet des associés et des collaborateurs issus du même cabinet. Nous avons fondé ce cabinet avec Sophie Imbault et Benoît Perrineau. Nous sommes tous les trois associés de « Prémisse », constituée sous forme d’AARPI. La répartition des activités reste assez proche de nos pratiques respectives de longue date, avec l’ambition de développer une activité tournée vers le droit public des affaires au sens large.

Comment se répartissent vos domaines d’intervention ?

Sophie porte une activité « habitat social » très spécifique par sa nature mixte, à l’interface du droit public et du droit privé. Benoît Perrineau intervient autour des questions d’aménagement d’environnement d’énergie et d’urbanisme. Pour ma part, je suis focalisée sur le droit public des affaires au sens classique : la commande publique et la contractualisation sous toutes leurs formes y compris les montages globaux et la création de structures selon les secteurs. J’ai également un développement marqué dans le secteur de la santé par l’accompagnement d’établissements publics de santé et d’établissements privés à but non lucratif type fondations et établissements similaires.

Votre clientèle est-elle plutôt publique privée ou hybride ?

Réellement hybride et cela varie selon les pôles ; nos clients sont tant de nature publique (établissements publics, l’Etat via des ministères, des collectivités territoriales etc.) que des sociétés de droit privé dans différents secteurs d’activité (immobilier, secteur santé, énergie etc.). J’ajoute que le droit public des affaires suppose un travail auprès de de nombreuses structures mixtes – elles même hybrides. Par exemple, l’activité « habitat social », l’équipe intervient pour des sociétés de droit privé investies d’une mission d’intérêt général comme des sociétés d’HLM. C’est également le cas dans tous les secteurs pour lesquels nous intervenons : nous conseillons des sociétés d’économie mixte et des groupements de coopération sanitaire réunissant hôpitaux et établissements privés de santé. L’hybridation est ainsi structurelle.

Cette hybridation influe-t-elle sur la manière de traiter les dossiers et d’échanger avec les interlocuteurs ?

Oui par les enjeux politiques d’abord qui ne se posent pas de la même manière côté public et côté privé. Ensuite, par la temporalité des projets qui diffère sensiblement selon les clients ainsi que par les processus de décisions auxquels il faut s’adapter. Ce sont des paramètres majeurs de pilotage des dossiers – et qui permettent de développer, en tant que conseil, une compréhension croisée des enjeux.

Concrètement comment se matérialise la relation entre un avocat et une personne publique au quotidien et faut-il systématiquement contractualiser ?

S’agissant de la contractualisation de nos interventions, en conseil nous intervenons principalement dans le cadre de marchés publics de prestations juridiques conclus en application du Code de la commande publique. Parfois seuls lorsque le cabinet réalise l’intégralité des prestations de conseil et, parfois, au sein de groupements associant différentes compétences financières, techniques, opérationnelles ou programmatiques. Sur de grands projets nous intégrons ainsi des groupements d’assistants (AMO) pour accompagner les personnes publiques depuis la faisabilité jusqu’à la réception de l’ouvrage et voire même pendant le suivi d’exécution ce qui peut représenter jusqu’à cinq à huit années d’accompagnement. Nous pouvons également intervenir sans marché public lorsqu’il s’agit de précontentieux ou de contentieux au bénéfice de personnes morales de droit public compte tenu des exceptions aux règles de mise en concurrence du code de commande publique dans ces hypothèses. Les clients privés ne sont pas soumis aux obligations de mise en concurrence.

Au-delà des honoraires quels sont aujourd’hui les vrais éléments différenciants sur un marché très concurrentiel en droit public économique ?

La compétence, la rigueur juridique et la réactivité vont de soi. Je crois que l’expérience est essentielle en ce qu’elle forge des réflexes juridiques et opérationnels sur les différents enjeux stratégiques. Ensuite, à mon sens, la proximité réelle avec le client. Ce qui compte c’est d’accompagner le projet de l’intérieur tout en restant à sa place de conseil, sans surplomb.

Existe-t-il des secteurs plus porteurs que d’autres ?

Tous les secteurs sont compétitifs, je ne suis pas sûre qu’il existe une solution magique. Avoir des secteurs de prédilection reste essentiel pour comprendre les enjeux opérationnels, stratégiques et le fonctionnement des acteurs au-delà de la seule technicité juridique générale. C’est aussi une question d’appétence : je crois sincèrement qu’on travaille mieux dans les domaines que l’on aime.

D’un point de vue organisationnel pourquoi avoir retenu l’AARPI et en quoi cela favorise-t-il le travail collectif ?

Le choix de l’AARPI s’est imposé naturellement. Elle porte un projet commun, un nom commun, une envie partagée et des moyens partagés tout en assurant une répartition claire. D’un point de vue strictement juridique, c’est une structure simple et c’est précisément ce qui nous convient pour travailler ensemble, avec confiance et souplesse sans lourdeur de règles internes.

Qu’attendez-vous de l’équipe support pour faire fonctionner le cabinet ?

Des qualités de rigueur administrative solides. La phase de création est exigeante administrativement y compris pour des avocats. Nous avons besoin d’une organisation administrative et financière fiable et d’une logistique qui permette à chacun de disposer de bons moyens pour travailler sereinement. Je ne crois pas qu’il n’existe pas d’organisation magique mais nous avons trouvé déjà un bon équilibre.

Vous avez défini une identité propre et créé votre logo et votre site. Quel cap avez-vous choisi ?

Après réflexion et plusieurs discussions nous avons retenu le nom de Prémisse Avocats – pour sa signification liée au syllogisme et aux étapes d’une démonstration. Ensuite, nous avons confié la création du logo et du site à un prestataire. Nous voulions un rendu graphique et sobre à l’image de ce que nous souhaitons démontrer : simplicité et efficacité.

Les compétences de droit privé sont-elles nécessaires à une pratique du droit public des affaires et comment les mobilisez-vous ?

Oui elles sont souvent utiles voire indispensables dans certains des dossiers que nous traitons. Il peut s’agir de droit des sociétés, droit social, droit immobilier au sens strict, propriété intellectuelle ou encore droit des assurances. Aujourd’hui, nous travaillons avec plusieurs consœurs et confrères, partenaires de confiance, tout en conservant la maîtrise des sujets publics. Nous ne sommes pas hostiles à faire croître Prémisse à terme en intégrant ce type de compétences, mais, à date, notre priorité est la consolidation de notre équipe et de nos activités.

Quel écosystème entoure vos interventions contentieuses et contractuelles ?

Devant les juridictions administratives nous plaidons partout en France. Devant les juridictions judiciaires nous pouvons recourir à des postulants. Nous collaborons aussi avec des huissiers et, régulièrement, avec des notaires notamment sur des montages fonciers complexes sur domaine public ou privé des personnes publiques impliquant droits réels ou divisions en volumes par exemple. Nous pouvons également mobiliser des expertises financières lorsque cela est nécessaire. Récemment, par exemple, pour un établissement à but non lucratif s’implantant sur le foncier d’un hôpital dans le cadre d’une convention d’occupation domaniale il nous a fallu objectiver les questions de durées contractuelles et déterminer les montants de redevances avec un partenaire financier habitué au secteur public compte tenu des enjeux sur la régularité des décisions et actes contractuels en résultant.

L’IDPA valorise la transmission. Est-ce une valeur cardinale dans vos recrutements ?

Oui. L’IDPA est un élément valorisant dans un CV, tel est également le cas des stages en juridiction administrative dont nous constatons l’apport direct dans la pratique. Nous avons d’ailleurs des collaborateurs issus de ce parcours.

Votre activité contentieuse se développe. Est-ce un choix stratégique ou une tendance de marché ?

Les deux. Pour des clients que nous conseillons au long cours il est précieux d’assurer aussi la défense contentieuse. Avoir une lecture des risques contentieux irrigue clairement la qualité des prestations de conseil. Par ailleurs, nous observons une hausse des contentieux sur certains sujets possiblement liée au contexte économique qui tend certaines entreprises et rend plus fréquentes les contestations de pertes de marché ou les actions en responsabilité. Nous voyons aussi davantage de référés.

Les grands projets annoncés — déploiement du fret ferroviaire / loi « industrie verte » — peuvent-ils marquer le retour des PPP et montages complexes à paiements différés ?

C’est possible d’autant que les contraintes budgétaires poussent à externaliser le financement. Pour autant, sur trois dossiers au cours des douze derniers mois, des projets de marchés à paiement différé étaient envisagés et ont finalement été abandonnés car jugés trop risqués à ce stade. Ce qui est certain, c’est que la réflexion revient après un arrêt parfois dogmatique des contrats de partenariat. Cela étant, les contrats de concessions de travaux ou de services constituent une autre voie d’externalisation du financement avec étalement de la charge financière. J’ai d’ailleurs travaillé sur un dossier de concession pour le ministère des armées sur un projet dans lequel une forme d’externalisation du financement conditionnait la réalisation des travaux, le montage en concession ayant permis de mettre en place ce projet.

La présentation des offres sur les marchés de conseil doit-elle être uniformisée et très soignée ou la forme reste-t-elle secondaire ?

A mon sens, il ne faut pas que la forme l’emporte sur le fond mais il est nécessaire d’être didactique et pour cela il est devenu nécessaire d’adapter la forme des offres. La concurrence dans notre activité est forte. La manière de présenter une offre doit démontrer notre capacité à produire un conseil synthétique et pédagogique dans le dossier. Idéalement, la forme reflète la qualité du fond. La création du cabinet nous a permis de remettre ces pratiques à plat.

Monter un cabinet n’est pas neutre en charge de travail. Comment avez-vous concilié création et continuité des dossiers ?

L’installation fin mai a rendu les mois de mai-juin-juillet très intenses pour nous toutes et tous. Nous avons soufflé en août grâce à l’accalmie des dossiers tout en poursuivant les chantiers de création car de nombreux sujets prennent toujours plus de temps que prévu.

Et le choix des locaux à l’heure du télétravail généralisé ?

Nous avons privilégié des surfaces raisonables et une adresse centrale et soignée ; cela a, notamment, pour objectif de pouvoir accueillir nos clients dans des conditions agréables, d’optimiser les coûts immobiliers et répondre à des souhaits significatifs de télétravail d’environ deux à trois jours par semaine voire davantage selon les besoins et les envies de chacun ; l’essentiel reste la qualité du travail quel que soit le lieu. En outre, nous nous retrouvons tous régulièrement pour maintenir une dynamique d’équipe.

Un conseil à un jeune juriste qui prête serment et voudrait créer un cabinet en droit public des affaires ?

Deux éléments paraissent indispensables, outre la qualité juridique : la confiance et l’identification. Il me semble qu’un peu d’expérience aide à gagner en assurance et cette identification par le réseau, les guides et l’historique des dossiers facilitent le développement de la clientèle. Je crois qu’il est possible de s’installer tôt si l’on a trouvé les bons partenaires. S’installer seul me paraît plus risqué dans nos domaines du droit public des affaires où une certaine visibilité est nécessaire afin de travailler avec la clientèle institutionnelle (publique ou privée) qui composent une grande partie de la clientèle de ce domaine. Dans certains segments très spécialisés cela peut se tenter mais en général l’expérience et les appuis demeurent déterminants.

Me Rémi JABAKHANJI

Pouvez-vous vous présenter succinctement ?

Je suis originaire de la région Grand-Est et j’ai effectué l’essentiel de mon cursus à la faculté de Reims. Pour moi, le droit n’était pas une vocation du premier jour : j’ai commencé mon cursus par une licence en économie, à l’occasion de laquelle j’ai assisté à mes premiers enseignements généralistes dans la matière juridique. J’ai effectué une transition en licence de droit, puis suivi un parcours classique avec un master 1 de droit public puis un master 2 de droit public approfondi. Admis à l’examen du CRFPA je suis monté à Paris pour intégrer l’École de formation du barreau ainsi que l’IDPA.

Pourquoi avoir choisi l’IDPA en complément de l’EFB ?

L’IDPA m’a séduit par la qualité de son corps enseignant composé essentiellement de praticiens et par son approche opérationnelle du droit public des affaires. Les cours de droit des contrats et de technique contentieuse m’ont particulièrement marqué. C’était aussi l’occasion de rejoindre une communauté de publicistes au sein de l’EFB avec une ambiance chaleureuse et stimulante.

Quelles ont été vos premières expériences professionnelles ?

Avant mon admission au CRFPA, j’ai débuté par quelques stages au sein de services juridiques en administration ainsi qu’en cabinet d’avocat. Mes stages les plus marquants étaient ceux réalisés en tant qu’élève avocat. J’ai d’abord effectué un stage au tribunal administratif de Paris en contentieux public, notamment en droit de la responsabilité. Après six mois de formation au sein de l’école et de l’IDPA, j’ai réalisé mon stage final chez Earth Avocats, expérience qui s’est avérée déterminante dans mon jeune parcours professionnel. Lors de ce stage, on m’a rapidement fait confiance et confié des dossiers intéressants et substantiels. J’en remercie l’ensemble du cabinet et particulièrement Me Florence David. À l’époque, l’activité à laquelle je contribuais était quasi exclusivement orientée vers le conseil, mais tend aujourd’hui à se rééquilibrer avec une part importante de contentieux.

Qu’est-ce qui vous a conduit à suivre Me David dans cette nouvelle aventure et quels sont les impacts concrets pour un collaborateur ?

C’est une décision qui se mûrit. D’abord, il est important de sonder son envie de participer activement à un tel projet, avec l’énergie et la souplesse qu’implique le travail de collaborateur dans une structure nouvelle. En termes de mise en œuvre, il y a concrètement l’organisation du départ, le respect et la mise en œuvre du préavis, l’engagement de discussions que j’ai souhaitées loyales et transparentes avec la structure que l’on quitte et avec l’associé que l’on suit, l’anticipation des jours de congés restants pour garantir la continuité de l’activité, etc. Rien d’insurmontable, mais ces sujets doivent être gérés de manière professionnelle afin d’éviter toute frustration. Enfin, il faut anticiper les conditions concrètes d’exercice dans la nouvelle structure, avec la continuité ou non entre les postes et les dossiers, les éventuels équilibres nouveaux du temps de travail, les modalités de télétravail et de présentiel, de rémunération et conditions relatives à la clientèle personnelle. Dans une phase de création, les collaborateurs sont souvent davantage présents sur le fond des dossiers pendant que les associés développent la clientèle, ce qui est très formateur et peut constituer une opportunité de montée en responsabilité.

Justement la place de la clientèle personnelle devient-elle un sujet de négociation majeur pour votre génération ?

Il est difficile de parler pour l’ensemble d’une génération, mais j’ai le sentiment qu’il y a une envie grandissante de liberté d’organisation et de développement personnel parmi les jeunes avocats. Dans ce contexte, échanger avec son associé afin de négocier des conditions d’exercice permettant de constituer une clientèle personnelle est particulièrement important. Dans le cadre d’un changement de structure par exemple, c’est un souhait qui doit être clairement exprimé. On peut aussi imaginer des aménagements de temps de travail, par exemple un quatre-cinquièmes pour se consacrer à des activités autres que celles du cabinet, ou au contraire rester à temps plein tout en amorçant un développement ciblé d’une clientèle personnelle, même si cette question est bien plus large que la seule constitution d’une clientèle. Tout dépend en réalité de son projet et ses attentes, ainsi que de la relation développée avec le cabinet.

À quelle fréquence faut-il selon vous rediscuter de ces attentes avec ses associés ?

À mon sens, le plus régulièrement possible. À défaut, l’entretien annuel doit être un vrai temps d’échange sur les attentes et perspectives de chacun, notamment la rémunération, la progression, le développement et les objectifs ou attentes respectives. Autour de moi, je remarque que des réflexions de carrière plus globales s’amorcent à partir de la troisième ou quatrième année de collaboration, avec de vraies questions de fond : se projette-t-on dans un projet d’association ? À quel horizon ? Sur quel modèle de développement ? Dans quelles conditions et quelle compatibilité avec ses projets personnels ?

Les jeunes publicistes sont-ils particulièrement tentés par d’autres voies ? En administration ou secteur privé ?

Statistiquement, cela me semble indéniable. Les rapports publiés révèlent que les premières années d’exercice sont celles où l’on quitte le plus souvent la robe pour des raisons diverses de rythme de travail, de responsabilité ou d’équilibre de vie voire de non-épanouissement dans la profession. En fonction des situations de chacun, les alternatives à l’avocature peuvent être attractives. Pour ma part, je m’épanouis pleinement dans la profession d’avocat, mais il s’agit simplement de l’une des nombreuses manières possibles d’exercer le droit public et non d’une fin en soi.

Sommes-nous suffisamment préparés à ce métier à la sortie de l’école et que vous a apporté l’IDPA ?

À l’EFB le contenu pédagogique reste naturellement généraliste avec une forte inclinaison pour le droit privé et la procédure judiciaire. L’IDPA apporte beaucoup de ce point de vue, puisque l’on y côtoie des praticiens du droit public des affaires et qu’on y travaille des cas concrets. Aussi, les avocats publicistes sont, le plus souvent, amenés à réaliser un travail de fond important en amont des audiences, ce qui rapproche le contenu pédagogique de l’IDPA de notre pratique. Naturellement, nous ne sommes jamais totalement préparés et l’immersion concrète par les stages et l’alternance restent à mon sens la meilleure manière de se projeter.

Me Emmeline BOITEL

Pouvez-vous vous présenter succinctement ?

Je suis Emmeline Boitel, avocat au barreau de Paris, ayant prêté serment il y a plus de six ans. J’ai entamé mon parcours universitaire à l’Université du Maine, au Mans, où je me suis rapidement orientée vers le droit administratif. J’ai ensuite poursuivi mes études à l’Université d’Aix-Marseille, où j’ai obtenu un Master 2 en Droit et Pratique des Contentieux Publics. Par la suite, j’ai intégré l’École de Formation du Barreau (EFB) ainsi que l’Institut de Droit Public des Affaires (IDPA). Lors de mon stage PPI, j’ai eu l’opportunité de travailler au sein de SNCF Réseau, où j’ai pu appréhender les enjeux du droit de l’urbanisme appliqués à des projets d’envergure, ce qui a enrichi mon expérience pratique. Cette expérience m’a beaucoup plu et a confirmé mon souhait d’exercer dans ces matières. À l’issue de cette expérience, j’ai donc choisi de poursuivre ma carrière dans un cabinet spécialisé en droit de l’urbanisme et de l’environnement. J’ai ainsi débuté ma collaboration au sein du cabinet CGCB Associés, avant de rejoindre Me Benoît Perrineau, avec qui je travaille maintenant depuis plus de quatre ans.

Comment articulez-vous votre veille sectorielle ?

La veille juridique est aujourd’hui indispensable pour tout avocat, quelle que soit sa spécialité. Elle fait, à mon sens, pleinement partie de notre activité, car elle permet d’anticiper les évolutions normatives et jurisprudentielles qui influencent directement les stratégies de nos clients. Face à un environnement juridique en constante évolution, il est essentiel d’intégrer la veille au fonctionnement du cabinet — par exemple, en la répartissant entre les membres de l’équipe. L’externalisation peut utilement compléter cette organisation interne, mais ne saurait s’y substituer. La véritable valeur ajoutée de l’avocat réside aussi dans sa capacité à interpréter l’information, à la contextualiser et à en tirer des conséquences opérationnelles concrètes. En définitive, le temps consacré à la veille ne doit pas être perçu comme une contrainte, mais comme un investissement stratégique au service de la qualité du conseil.

Comment composer avec la technicité (ingénierie/environnement) des matières abordées en urbanisme ? Faut-il se former ?

En droit de l’urbanisme, la technicité est inhérente à la matière. Il ne s’agit pas seulement d’interpréter des règles juridiques, mais aussi de comprendre les enjeux techniques. C’est ce croisement entre droit et technique qui fait la richesse et parfois la complexité de notre pratique. L’objectif n’est pas de devenir ingénieur, mais de savoir lire un plan, comprendre une étude d’impact, dialoguer efficacement avec les bureaux d’études et autres experts. Cela suppose avant tout une curiosité, de l’expérience et un réel goût pour le travail en équipe pluridisciplinaire. En somme, se former, oui, mais plus encore il faut rester ouvert, rigoureux et toujours prêt à naviguer entre les logiques juridiques et techniques.

A votre sens faut-il se spécialiser en contentieux ou conseil jeune ? Ou la maîtrise des deux activités demeure-t-elle nécessaire ?

En début de carrière, il me semble essentiel de se former aux deux exercices, contentieux comme conseil. Ils sont complémentaires et permettent de mieux comprendre les attentes des clients, mais aussi les risques et logiques sous-jacentes à chaque dossier. Avec l’expérience, une spécialisation peut naturellement se dessiner, en fonction des affinités ou de la structure du cabinet. Mais conserver une double compétence reste, à mon sens, une vraie force. Un bon conseil s’appuie sur une solide connaissance du contentieux, et un contentieux bien mené suppose souvent une bonne compréhension des logiques de prévention et d’accompagnement amont.

Comment articulez-vous votre activité avec le télétravail ?

J’exerce mon activité avec une grande flexibilité, partageant mon temps entre Paris et une ville de province. Cette organisation est rendue possible grâce au télétravail, qui me permet de mieux structurer mon activité. Le télétravail favorise une meilleure concentration et productivité, loin des interruptions du bureau, tout en facilitant l’équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle, essentiel dans un métier exigeant. Toutefois, pour être efficace, il demande une organisation rigoureuse et une discipline stricte : planifier ses journées, anticiper les échanges, et maintenir un lien constant avec l’équipe afin de préserver la dynamique collective. Le principal défi reste d’éviter l’isolement et de garder une frontière claire entre travail et vie privée. À mon sens, la clé réside dans l’alliance entre souplesse et rigueur, pour rester productif sans perdre le contact humain.

Réalisation de l'entretien : Augustin BERGONZI Responsable de la Gazette de l'IDPA